Il serait vain de vouloir rappeler ici ce qu'a été l'apport de Brecht pour le théâtre du XX^e siècle. Il a dit tant de choses essentielles à propos desquelles tant d'autres choses ont été dites que les mauvais esprits finiraient par nous faire croire qu'il n'a été qu'un théoricien (forcément ennuyeux...).

Heureusement, une telle malhonnêteté ne tient pas dès lors que l'on aborde son œuvre par le corps et par le verbe, pour découvrir jusqu'à quel point son regard malicieux était juste, ses mots exacts, ses constructions dramatiques adroites. Dans Le Précepteur, tout l'art du praticien du Berliner se révèle, et l'implacable mécanique d'horlogerie qui entraîne Lauffer, précepteur émouvant, sensible et drôle dans sa faiblesse même, cache bien des ressorts.

Pièce sociale certes, qui pose avec pertinence le problème de la place de l'intellectuel dans une société d'artifice, mais aussi pièce tendre et charnelle où se révèlent toutes les facettes et tous les pièges de l'amour, mais encore pièce épique et idéaliste, où la lâcheté devient héroïque tandis que des étudiants bohèmes croisent des adolescentes qui rient un peu trop fort...